Attention, quand j'ai
raconté, juste après l'avoir vécu, ce que je relate ici, certains
ont été choqués. J'ai donc envie de dire:
« Âmes sensibles s'abstenir ! »
« Âmes sensibles s'abstenir ! »
Chez moi, une
infirmière vient tous les deux jours pour désinfecter et changer
les pansements de mes « redons » (les tuyaux assez
inattendus qui sortaient de mon côté juste après l'opération).
Cinq jour après ma
sortie, je trouve que mon sein est douloureux et il me semble gonflé.
Même si je ne le regarde pas de très près, pas encore. Je ne me
sens pas prête à voir la cicatrice de près. Pour moi, il est
déformé. Il ne m'appartient plus. Déjà, je le coince dans un
soutien, depuis la sortie de l’hôpital... Ce soutien me coince...
et me rassure en même temps.
Après les conseils de
l'infirmière, je vais à l’hôpital pour être rassurée. J'y vois
l'assistant du chirurgien et le chirurgien. Tous les deux me disent
que ce n'est rien, à priori tout va bien. Je peux prendre des
anti-inflammatoires si j'ai mal. Et même en préventif. Je
m'applique à suivre leurs conseils. En plus de l'arnica que je
prends déjà en homéopathie.
Les
anti-inflammatoires, c'est peut être bien... Mais ceux là m'ont
enflammé le ventre.
Le dimanche. J'arrête
d'en prendre... Je ne sais rien avaler d'autre non plus.
La journée se passe
tranquille, plus ou moins. Je vais voir le potager partagé mais je
ne sais rien y faire parce que j'ai trop mal au ventre... Fin d'après
midi, Albert et moi nous mettons à la musique. Lui au piano, moi au chant. Petit à petit, mes forces reviennent avec la musique...
C'est thérapeutique.
Et puis, tout à coup,
je sens comme un gros pincement dans mon sein. Je regarde dans mon
soutien et je vois qu'il est déformé. Je ne sais pas expliquer
mieux. Il est juste ...déformé. J'ai peur. Une peur soudaine. Je me
rends compte qu'il est en train de gonfler. Encore et encore. Je
crie ! J'ai très peur ! Je prends le glaçon dans le
congélateur. J'essaie d'appeler le 100... ou Albert, je ne sais
plus....
On fonce dans la
voiture... Je respire vite. Mon sein continue de gonfler !!! Je
ne comprends pas ce qui se passe. J'ai la peau tendue. Très fort.
J'ai peur de chez peur...
Dans la voiture, je
dis à Albert de foncer. Je m'en fiche des PV. Là, je voudrais déjà
être arrivée aux urgences... Et on démarre seulement... Je respire
toujours vite. Je crie encore. Albert, à côté, appuie sur
l'accélérateur. Je sens mes doigts qui picotent... Mon sein
continue de gonfler. Je sens quelque chose qui craque à l'intérieur.
Je hurle. Je panique. Albert re-téléphone au 100 pour que les
urgences soient prévenues de notre arrivée. Il me passe le
téléphone. Mes doigts se crispent sur le gsm. A l'autre bout,
j'entends quelqu'un qui me dit de respirer plus calmement. Je respire
trop vite. « J'hyperventile » paraît-il. Je sens des picotements
dans mes jambes et dans mon ventre. J'ai l'impression que mon cœur
palpite... J'entends à peine ce que le monsieur du gsm me raconte...
J'essaie de me rappeler comment on respire au yoga... Mais je n'y
arrive pas. J'ai mal. J'ai trop mal. J'ai peur, j'ai trop peur. Je
suis trop dans la panique. Albert roule encore trop lentement... Et
puis, vision sublime : voilà que nous apercevons l’hôpital.
Albert s'arrête juste devant les urgences du CHR de Namur. Il sort précipitamment
de la voiture. Je ne sais pas bouger. Je me sens paralysée.
Il y a, devant la
voiture, deux infirmiers assis sur le pare choc d'une ambulance, en
train de fumer. Ils nous voient arriver et ne bougent pas. Quand
Albert sort, l'infirmière lui dit de façon très laconique « Hé
Monsieur, vous avez failli nous écraser... » Mais personne
ne bouge pour venir me chercher. Mes doigts sont coincés sur le gsm.
Je suis incapable de bouger. J'ai mon autre main qui tient le glaçon
sur mon sein. Depuis le début.
Je vois Albert arriver
avec une chaise roulante. Il se fait intercepter par deux autres
infirmières. Albert et l'une d'elle me sortent de la voiture. Puis,
les deux infirmières m'emmènent dans une petite salle. Elles ne
veulent pas qu'Albert rentre avec moi. Je ne sais pas pourquoi. Je ne
comprends pas pourquoi. L'une revient. Elle me fait respirer dans un
masque et me donne un « témésta ». J'arrive à
reprendre ma respiration. Tout doucement.
Le médecin arrive. Il
me fait enlever mon sweat-shirt. C'est difficile. D'abord, j'ai le
bras gauche qui est toujours limité dans ses mouvements... ensuite,
j'ai terriblement mal. Les infirmières m'aident. Le soutien est
taché de sang. Le médecin jette un bref coup d’œil. Il me dit
que « je ne risque rien ». Il demande à ses infirmières
de me mettre une compresse sur le sein. Et il nous renvoie à la clinique Sainte Elisabeth de l'autre côté de la ville. Là où j'ai été
opérée... par nos propres moyens.
Nous remontons dans la
voiture. Cette fois, Albert roule plus prudemment. Je suis plus
calme. Peut être le témésta. Arrivés aux urgences de l'autre
côté, je suis installée dans une chambre aux urgences. Je pleure,
j'ai trop mal ! J'ai l'impression que mon sein va exploser !
Une infirmière vient. Elle m'installe un cathéter, m'injecte un
anti-douleur et va chercher un médecin. A côté de nous, un autre
couple est là aussi. Le médecin des urgences m'envoie rapidement
dans le service gynécologie. L'assistante du chirurgien qui m'a
opérée est là. Quand elle voit mon sein, elle court appeler la
gynécologue de garde. Celle-ci arrive. Elle me voit et décide
de faire une ponction... Je n'ose pas regarder la grosse seringue
qu'elle amène. J'ai mal... Et puis, elle y va. Elle tire le sang qui
est dans mon sein. J'ai une hémorragie. Le peu qu'elle arrive à
sortir me soulage déjà... Mais ça ne suffit pas. La gynécologue, dépitée, décide de m'opérer. En urgence.
Une infirmière
m'amène vers l'ascenseur du bloc opératoire. Albert, dans le
couloir muse la chanson que nous chantions dans l'après midi: « Quatre vingt quinze fois sur cent... »
L'infirmière l'entonne avec lui... Je m'y mets aussi. Je
suis soulagée de me concentrer sur cette chanson plutôt que sur
cette opération en devenir.
Arrivée en salle
d'opération, je retrouve la gynécologue, l'assistante et un
anesthésiste. Je réalise qu'on est dimanche soir. Je demande :
« Vous n'avez pas fait guinze ce weekend ? »
L'anesthésiste rigole et me dit que quand il est de garde, il « ne
fait pas la fête ». Je me laisse m'endormir rassurée...
Je me réveille dans
une chambre. Albert est là. Dans le fauteuil à côté du lit. Il me
donne la main. Je me rendors...
Dans mon sommeil,
j'entends quelqu'un qui dit « Aïe ! » Et, je me demande dans mon sommeil : « Pourquoi il dit "Ail" ? Il pourrait dire "carotte" ou "poireau"! »
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